lundi 1 mars 2010

Régionales : Un train peut en cacher un autre. Tribune d'Yves Pelle

La campagne qui démarre s’annonce bien morne et dérisoire. L’onde médiatique nous promet au mieux un sondage d’opinion grandeur nature à deux ans des élections présidentielles. La Bretagne, terre d’initiative, d’entreprise et de solidarité parait elle aussi avoir perdu son souffle. Et pourtant.

La dure réalité est, il est vrai, bien difficile à entendre. Ainsi par exemple, les bretons paieront en 2010 trois fois plus en intérêts sur la dette de l’Etat français (Environ 3 milliards d’€) que le budget annuel de la Région. La Bretagne, d’après l’étude Eurostat qui vient de paraitre, affiche une richesse par habitant au dessous de la moyenne des régions européennes (94%), comme d’ailleurs la plupart des régions françaises. A la différence des autres grands pays qui placent plusieurs régions dans les 40 premières affichant une richesse supérieure à la moyenne, seule la région Ile de France y apparait pour la France. Cherchez l’erreur ! La majorité sortante bretonne, dans un surprenant consensus ambiant, s’est engagée dans la construction de la ligne TGV qui va couter plus de 500 millions d’Euros à la région et va assécher pour longtemps ses finances. Outre les plus de 2000 hectares de terre agricole que ce projet va consommer, il n’aura comme résultat que la transformation progressive de Rennes en ville satellite de Paris et l’accentuation de la fracture entre Est et Ouest de la région. Monsieur Le Drian nous annonce le très haut débit comme ambition de la nouvelle mandature alors que la carte du haut débit breton montre encore tant de territoires non desservis. Ce ne sont là que deux exemples de cette recherche du « toujours plus » alors que les problèmes quotidiens ne sont pas traités. Car la dure réalité c’est aussi un nombre d’inscrits au chômage qui a augmenté de 26% en un an en Bretagne, c’est l’existence d’une vraie pauvreté, ce sont les services publics de santé qui se dégradent, le manque de logements sociaux, c’est l’essoufflement du modèle économique qui a porté le dynamisme breton au long des trente dernières années, c’est un mode de développement qui menace l’environnement.

Faut-il alors se résigner ? Nos atouts restent exceptionnels. Terre d’harmonie, d’intelligence et de culture humaniste la Bretagne doit prendre appui sur ses points forts pour se projeter vers l’avenir. « S’autoriser une fierté d’appartenance pour entreprendre » écrivait Yannick Le Bourdonnec. Mais surtout elle doit s’affirmer responsable de son avenir, afficher sa volonté d’émancipation. Il n’est plus possible d’entendre comme trop souvent à droite comme à gauche que c’est la faute de l’Etat. Est il crédible de dire, à quelques jours des élections, comme Monsieur Hascouet que l’on va assigner l’Etat français devant la Cour de justice de l'Union Européenne pour résoudre le problème des algues vertes alors qu’on a été pendant 6 ans en charge de la région ? Ou encore affirmer comme Monsieur Le Drian que la question de la réunification bretonne dépend de la volonté de l'État d’organiser une consultation des bretons ?

Ce que nous ne demanderons pas, personne ne nous le donnera. Les bretons doivent avoir confiance en eux et affirmer avec clarté et détermination leurs choix. Pour ma part je défends une région émancipée qui réclame plus de compétences, pour l’eau, la culture, l’éducation, la santé publique, les fonds européens, qui s’engage pour la réunification avec la Loire Atlantique et des élus qui soient pleinement responsables devant les bretons. C’est pourquoi je suis farouchement opposé à la réforme administrative en cours, dont personne ne parle plus, et qui ne va contribuer qu’à renforcer le pouvoir des préfets nommés à Paris. La région ne disposera plus d’aucune autonomie financière, elle n’aura plus la compétence générale. Autant dire adieu au modèle des régions européennes que seule la France refuse. La Bretagne n’est pas prête d’avoir les moyens de la Catalogne, de l'Écosse ou du pays de Galles qui sont aujourd’hui vingt fois supérieurs aux siens.

Nous devons enfin prendre conscience que toute société ne progresse qu’à la vitesse que peuvent supporter les maillons faibles de la chaine qui la forme. Gardons en Bretagne, terre de solidarité, d’équilibre entre terre et mer, de maillage de villes moyennes, nos valeurs et exigeons les compétences qui garantiront un avenir décent et responsable pour nos enfants. Faute de quoi le TGV viendra bien mais la Bretagne et les bretons resteront à quai pour longtemps.


Yves Pelle
1er adjoint au maire d’Erquy
Candidat sur la liste « Nous te ferons Bretagne » pour les Côtes d’Armor

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